Chroniques poétiques

Les chroniques poétiques d’Alix Lerman Enriquez

Après trois mois de fermeture, le jardin botanique a rouvert ses portes. Maintenant que je peux enfin recouvrer ce petit coin de ciel bleu, havre de paix et de verdure dans l’océan urbain qui le borde, je mesure combien il m’a manqué.

Un arbre m’a ému en particulier dont je me suis beaucoup languie. Il s’agit de l’érable du Japon, rencontré au hasard de mes pérégrinations automnales. C’était un de ces automnes froids et secs sous un ciel bleu de glace, indéfectible, et qui me toisait de son œil d’azur. Je scrutais le firmament empreint de poésie et d’une musicalité cristalline depuis que des oiseaux le feuilletaient à livre ouvert.

La rouille solaire dans le ciel descendait sur les arbres et les fleurs qui la recueillaient de leurs corolles fragiles et creuses. Les roses tardives d’automne, trémières et solitaires sous les flammes d’or, ouvraient leur calice ébréché.

L’érable du Japon m’attendait au coin, exhibant ses feuilles de corail, joyaux pourpres et solaires qui recueillaient l’or de l’aube. Chaque feuille était un trésor, une main de feu qui se recroquevillait sous ma paume blessée par le vent et la rugosité de la pierre. J’en faisais rouler une dans mes mains caressées de soleil et que j’avais ramassée sur le sol grège, sol rempli de la douceur et de la couleur des blés.

Cette feuille me revenait comme une perle de corail dans son écrin de velours. Elle me rappelait à de doux souvenirs d’enfance lorsque nous courions au jardin du Thabor sur les monticules de verdure et de rougeoiement dans la lumière bretonne d’un septembre plein de rosée et de sciures de ciel clair.

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