Chroniques poétiques

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Alix Lerman Enriquez

Les chroniques poétiques d’Alix Lerman Enriquez

La clef des songes

Sous l’aube violette, je marchais au creux des sillons solaires, les abeilles butinaient le sentier de l’été. J’entrais dans l’auberge de pierre avec ma grande clef rouillée qui avait sur elle encore un parfum de lavande et de rose trémière.

Sur le linteau de bois au dessus de la porte ouvragée, étaient gravées les quatre lettres du mot « rêve ». À l’intérieur, le soleil rentrait à flots, déversant ses cohortes de pièces d’or sur les meubles de bois brut, sur les murs peints à la chaux vive de l’été.

Au milieu de la table de pin grège, une pomme rose jouxtait la carafe transparente dont l’eau miroitait comme un ciel clair. Dans le verre d’eau qui tintinnabulait à côté et que je pris à pleine main, une rondelle de citron plongeait comme un soleil sur la mer bleue. Soulagée par ce breuvage providentiel, je me désaltérais longtemps comme à la source de mon enfance.

Plus loin, à l’intérieur de la bibliothèque qui croulait sous une avalanche de livres aux tranches multicolores, je choisis un livre rouge dont le titre « L’interprétation des rêves » de Sigmund Freud me laissa particulièrement songeuse. Je m’assis sur le sofa et me mis à parcourir cet essai mystérieux qui me plongeait dans les méandres de l’inconscient et de l’onirisme le plus débridé.

La clef des songes à mes côtés, j’essayais de décrypter les rêves que j’avais pu faire auparavant. Mais rapidement, les bras de Morphée m’invitèrent à partager leur nuit et m’enlacèrent avant que mes analyses les plus perspicaces aient eu le temps de se vérifier et de pénétrer mon esprit déjà avivé par le flots de pensées et de paroles qui m’assiégeaient.

Lorsque je me réveillai, quelques heures plus tard, ne subsistait plus rien de l’auberge de pierre. À la place, un soleil sans limite brillait de tous ses feux à travers la fenêtre rectangulaire de ma chambre. Et cette lumière solaire, si vive par certains endroits, s’échouait, en ce début d’aurore, sur le ciel bleu de mon oreiller où ce rêve avait jeté l’ancre pour m’acheminer bien loin, pleine de la douce espérance d’un ailleurs.

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