Les chroniques poétiques d’Alix Lerman Enriquez
Nous sommes en automne, début octobre, les journées raccourcissent et déjà vers dix-huit heures, le ciel cendré prend la teinte blonde d’une harmonie vespérale. Le soir est perlé de roses trémières et du chant d’oiseaux entrecoupé du battement de leurs ailes et des percussions de la brise.
Sur la place de la République, à Strasbourg, bordée du grondement des tramways et du vrombissement des voitures, un petit parc préservé des agressions citadines émerge du tumulte : deux ginkgos immenses surplombent la verdure. Leurs feuilles d’or illuminent le ciel et la terre dans une symphonie de petits soleils blonds qui virevoltent, se détachent de l’arbre pour aller se poser sur l’herbe et l’humus.
Cette danse automnale ne cesse jamais : de l’aube à l’aurore, de l’aurore au soir et à la nuit dense. Chaque ginkgo est une flamme vacillante dans le ciel d’automne, une torche muette dont le feu tremblant éclaire le cœur et l’intimité des moineaux.
Le promeneur ramasse ces éventails dorés que l’arbre a semés comme des pièces d’or égrenées le long de son errance. C’est un trésor qu’il se garde de froisser et qu’il conserve cérémonieusement dans ses poches rapiécées de soleil. Parfois, sur le chemin, il fait luire et dorer ces feuilles blondes au soleil rouge des soirs d’octobre. Mais au contact de l’or crépusculaire, ces triangles jaunes brûlent dans un incendie solaire. Les mains du promeneur sont irradiées du feu du couchant et il s’écroule sur l’herbe, comme Icare foudroyé d’avoir voulu approché de trop près le soleil.
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Page mise à jour le 2 décembre 2023
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