Chroniques poétiques

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Alix Lerman Enriquez

Les chroniques poétiques d’Alix Lerman Enriquez

Le parcours des peintres

Je n’aime pas m’aventurer dans le quartier de l’Elsau à Strasbourg. Ses grandes tours de béton me donnent le tournis et le sentiment de désolation qui en émane n’est pas pour me mettre en joie. Loin de là !

C’est un dimanche, pourtant, que je me suis risquée à arpenter ces allées bétonnées et sans fleurs, criblées de corbeaux qui croassaient à nos pieds. Île de ciment maussade et lugubre, située entre la prison et l’hôpital psychiatrique, nous promettant une charmante chevauchée ! Mais pourquoi donc, à la vérité, ai-je porté mes pas dans ce sombre quartier ?

C’est que j’avais appris qu’au sein de cet archipel de béton subsistait encore une enclave pavillonnaire parsemée de coquettes petites maisons colorées nichées dans des allées aux doux noms de peintres et qu’on nomme justement « le parcours des peintres ». Ainsi les noms de Vermeer, Michel-Ange, Raphaël, Dürer, Caravage, Botticelli et tant d’autres encore, s’égrenaient comme les perles d’un chapelet qu’il me tardait de découvrir.

Je me suis hâtée, en effet, de repérer ce petit îlot de sérénité et de couleurs. Une maison rouge vif m’interpella tout particulièrement. Petit joyau dans son écrin de verdure, grenat dans cette cité résidentielle si fleurie.

Je me suis plu à déambuler dans ces ruelles pittoresques que parfumaient les prunus pourpres et les magnolias. J’aimais à entendre fredonner les moineaux, les colombes, les tourterelles. Un véritable havre de paix qui jurait avec les blocs de pierre aperçus tout à l’heure.

Puis j’ai continué ma petite chevauchée jusqu’à découvrir un sentier verdoyant le long de la rivière de l’Ill : sentier boisé où l’on pouvait apercevoir des colverts, des cygnes de neige longeant l’eau cendrée sous leur ciel d’or. Sentier de solitude et de recueillement que je me plaisais à arpenter lorsqu’à peine à un mètre de moi, je vis émerger la tête verdâtre d’un crocodile glissant sur l’eau grise. Je décidai de clore là mon périple et de quitter sans autre forme de procès ce si « charmant » parcours des peintres.

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