Bloc-notes

Les notes d’Alix Lerman Enriquez

Je descendais du train à la gare Montparnasse et me dirigeais prestement vers un bâtiment de briques rouges qui abritait le musée Bourdelle. En plein cœur de Paris, cet havre de paix avait quelque chose d’insolite et de presque miraculeux. Ce petit océan de verdure au milieu de l’asphalte et du béton, tout près de la bruyante avenue du Maine, recelait des trésors de sculpture qui invitaient au recueillement et à la contemplation.

Après avoir pris un billet d’entrée, j’entrais précautionneusement dans l’allée bordée de roses et de lilas qui menait à la salle d’exposition. À l’intérieur, dans l’espace aménagé à cet effet, sous les murs blancs peints à la chaux et dans le dénuement le plus extrême, les sculpture de bronze m’attendaient, offrant à chaque passant leurs lignes tourmentées et grandiloquentes.

Cinq ou six têtes de Beethoven m’encerclaient de toute part. Leurs bustes posés çà et là sur des socles de plâtre, se répondaient dans une symétrie étrange, se regardaient avec connivence comme des frères jumeaux ou des cousins d’une ressemblance frappante. Plus loin, une main immense me tendait sa paume, prête à recueillir mes joies et mes larmes et mes soupirs d’admiration.

Et dehors, dans le patio baigné de lumière, le cheval monumental ainsi qu’« Héraclès archer » me toisaient du regard comme du haut de leur monumentalité. Je me sentais minuscule et impuissante face à ces chefs d’œuvre d’une puissance inégalée, prête à m’endormir lovée sur l’arc d’Héraclès.

Le bleu du ciel d’azur perlait sur ma tête pleine de rêves de grandeur et de chevauchée terrestre. Je m’imaginais alors juchée sur le magnifique cheval de bronze parcourir tout Paris comme dans mes désirs les plus insensés.

Puis une petite clochette annonça l’heure de fermeture estivale du musée. Je m’éclipsais avec en tête des projets de folles promenades sous l’azur pétrifié de soleil.

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